Je suis hypocrite

En novembre dernier, les filles du projet montréalais 1001 Fesses étaient de passage à Rome, et en ont profité pour prendre mes founes en photo. Sur mon sofa, devant ma fenêtre, de près, de loin. Elles ont été absolument parfaites: j’étais en confiance, je me trouvais belle. Comme elles travaillent en argentique et qu’elles sont des busy bees pleines de projets, j’ai dû attendre quelques mois avant de voir le produit fini. Et j’ai finalement reçu mes cheeks dans mon courriel, il y a quelques jours.

Bam. Des belles photos prises par des professionnelles, qui m’ont dirigée comme de vrais anges pour que la lumière illumine parfaitement ma peau, pour que le décor soit doux et on point. Pis moi, j’ai vu quoi en premier?

Ma cellulite, mes cuisses que j’hais, mon weird bassin qui crée une bosse en haut de ma craque, mes plis, mes grains de beauté que j’ai toujours détestés du plus profond de mon âme. Mon nouveau corps qui a pris de l’expansion grâce à toutes les magnifiques choses que je mange et que je bois en Italie, sans vraiment me restreindre.

Parce qu’elles sont conscientes de l’aspect confrontant de se voir nue en photo, les filles de 1001 Fesses laissent toujours le choix à leur sujet; on peut publier les photos, on peut pas publier les photos. Up to us!

Mon premier réflexe a été de dire non, à moitié. J’étais okay avec la publication des photos qui me mettaient en lumière selon les standards du male gaze; perky butt, pas de plis, presque lisse, un peu sexy. Celles-ci:

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J’étais pas okay avec les autres. J’ai dit non, pis j’ai eu un drôle de feeling. Pour deux raisons:

Premièrement, je fitte calissement dans les standards de beauté avec mon 5pi8, 160 livres, avec mon corps blanc, sans handicap ni particularités. Je m’habille en large de chez Zara, j’ai du choix, je suis jamais discriminée à cause de ma taille, pis ça m’arrivera probablement jamais même si je prends un autre 30 livres.

Deuxièmement, je suis constamment en train de célébrer les corps différents sur mes réseaux sociaux, dans mon travail, dans ma vie perso. En tout cas, j’essaie. All bodies are good bodies pis toute la patente. J’admire le travail de plusieurs photographes qui mettent en valeur des corps gros, des corps hors-norme, et je me pâme de beauté.

Mais MON corps? MES plis? MES complexes?

Soudainement, toutes mes belles valeurs, ma déconstruction de ma propre grossophobie, mon message d’acceptation de nous-mêmes peu importe de quoi on a l’air prennent le bord su’un esti de temps.

Je me suis sentie hypocrite.

Vraiment.

«If you do not tell the truth about yourself you cannot tell it about other people» a dit Virginia Woolf. Habituellement, j’suis pas pire pour dire la vérité. J’suis assez transparente dans la vraie vie comme sur les réseaux sociaux. Ma quête d’authenticité transparait, en tout cas, je pense, dans ma démarche personnelle et professionnelle.

Mais là, j’ai senti que je cachais, que je mentais. Que je me trahissais, en quelque sorte.

Faque les voici, les fameuses photos:

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J’suis pas «brave» de les partager. Je mérite pas de tape dans le dos.  Mon premier réflexe aurait dû d’être okay avec mes imperfections. Mon premier réflexe aurait dû être de voir la beauté dans la douceur de ma peau, les constellations dans mes grains de beauté, le confort dans mes plis. C’est tout.

Ça m’a pris about a week pour digérer, pour penser, pour finalement me trouver hot as fuck dans les premières photos comme dans les secondes. Ç’a été un processus, un travail, malgré tous mes beaux posts féministes de confiance en soi pis de body positivity sur le gram’.

Je suis tombée sur cette phrase sur Internet : «The first thought that goes through your mind is what you have been conditioned to think; what you think next defines who you are.»

J’espère que c’est vrai.

 

 

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